Question écrite sur l’intermodalité train – vélo

Bastien Lachaud interroge la ministre des transports sur la politique des transports favorisant le vélo. Car plutôt que de commencer la privatisation de la SNCF, il y aurait mieux à faire en revitalisant les petites lignes, et en encourageant les transports écologiques comme le vélo pour aller et repartir de la gare. Il est bien beau d’encourager les petits gestes du quotidien en guise de politique écologique, il serait beaucoup mieux de mettre en place une politique ambitieuse pour permettre à tou·te·s de changer ses habitudes.

Lire la question :

M. Bastien Lachaud interroge Mme la ministre, auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports sur la question de l’intermodalité vélo – train et sur les actuelles difficultés auxquelles sont confronté·e·s les usager·e·s du service public pour monter à bord d’un train avec une bicyclette.
« Vous aimez voyager ou vous déplacer en vélo ? Découvrez nos offres et profitez de 30 à 50% de réduction sur l’achat d’un vélo électrique » annonce fièrement le site de la SNCF. D’un autre côté, France Vélo Tourisme, par ailleurs partenaire de la même SNCF, admet qu’« il n’est pas toujours facile de transporter son vélo dans les différents trains en France. » C’est que, derrière les annonces, la politique de la compagnie en termes d’intermodalité reste insuffisante.
La notion de l’intermodalité, c’est-à-dire l’utilisation combinée de plusieurs modes de transport pour un trajet, répond à des enjeux multiples. Promouvoir l’intermodalité permet de diminuer les émissions de gaz polluants en réduisant l’usage de la voiture et de sauvegarder la santé publique. Une étude fournie par l’association du Groupement des Autorités Responsables de Transport, Les pratiques d’intermodalité vélo- transports collectif, explique que le coût d’un transport en voiture de 10 km est de 1000 euros par an, pour 100 euros en vélo. Encourager l’intermodalité, c’est donc permettre des transports avec un coût soutenable, favorisant ainsi le droit à la mobilité.
Malgré la publicité de la SNCF, compagnie qui tend à ériger en principe la possibilité de prendre un vélo dans un train aujourd’hui en France, de multiples obstacles remettent en cause l’effectivité de cette intermodalité, et démontre que ce type de fret est davantage envisagé comme une charge qui nuit à l’efficacité du transport ferroviaire. Il y a une distance considérable entre le droit à la mobilité des citoyen·ne·s usager·e·s du service public de la SNCF et les mesures, trop faibles, pour garantir ce droit, malgré les demandes des associations d’usager·e·s.
Plutôt que de mettre en avant la location de vélo, comme l’illustre la rubrique « Avant et après la gare » du site la SNCF qui titre « Vous souhaitez vous déplacer en vélo sur vos trajets quotidiens ou occasionnels ? Découvrez nos solutions pour louer un vélo, voyager avec et le stationner en toute simplicité », il serait nécessaire de contraindre ce service public à améliorer la prise en charge des vélos à bord des trains.
La première difficulté à faire un trajet vélo-train-vélo avec sa propre bicyclette surgit dans les transports régionaux. L’usager qui emprunte un Transilien a la possibilité de monter avec son vélo, gratuitement. Mais, ce droit lui est ôté à chaque forte affluence et aux heures de pointe – du lundi au vendredi de 6h30 à 9h30 et de 16h30 à 19h- c’est-à-dire les horaires où lui-même a besoin de prendre les transports pour rejoindre son domicile ou son lieu de travail. Dans le Grand Est, ce droit est restreint similairement. De nombreux TER ne sont pas accessibles aux vélos entre Strasbourg, Mulhouse et Bâle, du lundi au vendredi de 6 heures à 8heures 30 et de 16 heures à 18 heures 30. Globalement, s’agissant des TER toujours, l’usager ne peut réserver une place pour sa bicyclette.
Face à cette absence de garantie, on comprend aisément les travailleurs·euses qui préfèrent venir à la gare en voiture. D’autant plus que les parkings à vélo sont encore peu développés, et que laisser son vélo à la gare suppose de ne pas en avoir besoin à l’arrivée. Afin d’être sûr de pouvoir le conserver avec lui dans la voiture du train, le·a voyageur·euse doit en théorie le démonter. Cette difficulté technique est un rempart supplémentaire pour les travailleurs·euses qui veulent utiliser quotidiennement le vélo.
Lors de trajets longue distance, entre les grandes villes de France, la difficulté ne disparait pas. L’usager·e doit réserver au préalable le billet de son vélo, moyennent 10 euros. Mais, outre la faible quantité de trains équipés du nécessaire pour les accueillir, il n’est pas possible de réserver une place vélo via l’application mobile en même temps que son billet. Si le train n’accepte pas les vélos, il est possible de le démonter et de le mettre dans une housse – donc avoir le temps et les outils nécessaires pour cette tâche. Ou alors cela implique de renoncer à voyager avec son vélo. Cette alternative – démonter son vélo – apparaît comme la seule possibilité de voyager avec son vélo à bord d’un Ouigo, moyennant cette fois, cinq euros.
Au sujet des trains Intercité, il est parfois possible de réserver une place dans certains trains, mais sans réelle garantie. Ce constat montre l’absence de politique globale pour permettre aux cyclistes de voyager avec leur vélo, et a pour conséquence évidente que celles et ceux qui pourraient se déplacer à vélo plutôt en voiture en allant ou en partant de la gare, y renoncent faute de garantie.
Afin de favoriser l’intermodalité, des initiatives régionales ont émergées. Ainsi, la région Pays de la Loire subventionne l’achat d’un vélo pliant pour les travailleurs ou étudiants abonnés du TER.
A plus grande échelle, le Parlement européen amendait le 15 novembre 2018 le considérant 13 de la proposition de règlement européen sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires. Il renforce la position de la Commission, les entreprises ferroviaires « devraient notamment prévoir un nombre suffisant de supports de bicyclettes pour le transport de vélos assemblés dans des espaces réservés à cet effet à bord de tous les types de trains de voyageurs », et ce dans un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur du règlement
A l’heure du dérèglement climatique, de la 6e extinction des espèces vivantes, il est temps d’engager une transition écologique. Les citoyen·ne·s, conscient·e·s des enjeux, souhaitent participer à l’effort et utiliser davantage des de modes de circulation doux. Mais il faut que cela soit rendu possible par une politique cohérente et ambitieuse, notamment dans l’intermodalité vélo – train.
Aussi, M. Bastien Lachaud souhaite savoir de la ministre ce qu’elle compte faire pour répondre à cette nécessité de l’intermodalité, et quand la SNCF sera dans l’obligation d’aménager chacun de ces trains pour recevoir des vélos.

Lire la réponse, publiée le 13/04/2021 :

Répondre aux enjeux de la mobilité du quotidien, c’est considérer le vélo comme une véritable solution de mobilité. La loi n° 2019-1428 d’orientation des mobilités (LOM) témoigne de l’attachement du Gouvernement à ce mode de transport respectueux de l’environnement et protecteur de la santé publique. Elle comprend en effet un ensemble de mesures concrètes en vue d’atteindre l’objectif d’une multiplication par trois de la part modale du vélo à l’horizon 2024.

Premièrement, l’État a décidé de consacrer 350 M€ sur 7 ans à l’accompagnement des projets de continuité cyclable portés par les collectivités locales. Deuxièmement, le décret n° 2021-41 d’application de la LOM relatif à l’emport de vélos non démontés à bord des trains de voyageurs pour les services régionaux et longue distance a été publié le 19 janvier 2021. Il est issu d’une vaste consultation de l’ensemble des parties prenantes, compte tenu des fortes attentes exprimées par les usagers cyclistes et de l’attention portée à ce sujet par les entreprises ferroviaires et les autorités organisatrices de transport.

Ce texte règlementaire concrétise la politique ambitieuse du Gouvernement en faveur du vélo en fixant un seuil minimum de 8 emplacements vélos à prévoir à bord des trains. Il s’applique en particulier aux trains d’équilibre du territoire conventionnés par l’État, aux services librement organisés comme les TGV et aux services d’intérêt régional (TER).

Pour ces derniers ce seuil minimum peut être réduit jusqu’à 4 en fonction de la capacité d’emport des trains (Transilien en Île-de-France et TER dans les autres régions) afin de prendre en compte les situations locales. L’aménagement obligatoire d’emplacements vélos concerne les matériels roulants dont l’achat ou la rénovation est engagée à compter de mars 2021. Cette obligation ne s’appliquera donc pas aux matériels déjà en circulation ou pour lesquels les programmes d’achat ou de rénovation sont déjà lancés.

La SNCF s’est néanmoins engagée, de son côté, à intégrer, dans son programme « TGV M » lancé en 2016, un minimum de 6 emplacements vélos. De plus, le décret inscrit les conditions de transport des vélos à bord des trains parmi les informations minimales à fournir en amont du voyage, de manière à répondre aux besoins des usagers-cyclistes, lorsqu’ils organisent leurs déplacements dans le cadre de leurs loisirs ou pour leurs besoins de mobilité du quotidien.

Le Gouvernement tient enfin à encourager les autorités régionales qui s’engagent déjà dans le développement de l’intermodalité « train + vélo » : un décret sur l’équipement des gares et pôles d’échange en places de stationnement vélo sera prochainement publié, afin d’accélérer la dynamique de déploiement déjà engagée.