Participation de la France à l’ESA

Le 26 novembre 2019, Bastien Lachaud interrogeait Monsieur Philippe sur le montant de la participation de la France au programme spatial ESA. Deux jours plus tard, les chiffres sortaient : la France laisse son rang de première nation européenne en matière d’espace à l’Allemagne, avec un budget de 3,29 milliards pour cette dernière, contre 2,66 milliards pour la France. Sous son discours volontariste de façade, Macron abandonne donc la place de leadership de la France.

Voilà la question que M. Lachaud a posé :

M. Bastien Lachaud interroge M. le Premier ministre sur la participation de la France au budget de l’ESA. Les 27 et 28 novembre 2019, la conférence interministérielle de l’ESA devra prendre des choix budgétaires importants.

La France, 1er pays spatial européen, a naturellement toute sa place dans ces programmes. Le domaine spatial, en évolution rapide du fait de l’arrivée de nouveaux acteurs économiques, sur un marché auparavant réservé aux puissances étatiques, reste un enjeu crucial de souveraineté. En effet, l’espace est le carrefour d’enjeux scientifiques, pour la connaissance de la terre, du réchauffement climatique ou pour la recherche des origines de l’univers, mais aussi de télécommunications, ou encore de défense. Les enjeux risquent d’évoluer vers la question de la marchandisation, avec l’accroissement du secteur privé, et les décisions prises par certains états de ne plus considérer l’espace comme une res nullius.

Plus encore, le projet de la NASA, auquel participe l’ESA, de retourner sur la lune en vols habités, et de préparer l’éventualité d’un vol habité sur mars, va créer un effet d’entraînement de la société vers les questions spatiales. La France doit prendre toute sa place dans cette aventure spatiale. L’excellence de sa recherche et de son industrie, combinée à une volonté politique forte, lui a permis d’être au premier rang des nations spatiales historiques. Le communiqué du 6e CoSpace précise par ailleurs que dans un contexte de compétition internationale accrue et de profonde transformation, la France maintient sa place de premier plan dans tous les domaines : lanceurs (avec un soutien marqué à la future Ariane 6 et à la notion de préférence européenne) comme satellites (plateformes, charges utiles et équipements pour les télécommunications, l’observation de la terre, les sciences), en date du 25 octobre 2019.

À cette occasion, Florence Parly, ministre des Armées, a déclaré : « L’espace, peu régulé, est une zone d’opportunités comme de nouvelles menaces. Les progrès techniques de différents acteurs, parfois non-étatiques, posent de nouveaux défis. La France doit continuer d’innover dans sa stratégie pour le domaine spatial, afin de rester en pointe dans les domaines civil et militaire ». Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, a déclaré : « L’accès à l’espace et la maîtrise des technologies associées est un levier de puissance pour la France. Il faut poursuivre les efforts d’innovation pour conserver notre rang, dans une compétition mondiale féroce. Je compte sur les acteurs industriels, grands groupes et PME, français et européens pour s’organiser et se battre, avec notre soutien, à armes égales avec leurs grands concurrents ».

Or le comité de concertation entre l’État et l’industrie dans le domaine spatial prévoyait plusieurs scenarii dans les fourchettes allant de 2,6 milliards d’euros à 4. L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, soutient une participation française au budget de l’ESA pour la période 2020-2022, correspondant au scénario haut de 3,1 milliards d’euros du comité État-industrie sur l’espace (COSPACE), dans un communiqué en date du 21 octobre 2019.

Pourtant, Bercy aurait préparé un scenario pour une participation à 2,1 milliards d’euros. Dans le même temps, l’Allemagne prévoirait une contribution allant jusqu’à plus de 3 milliards d’euros. L’ESA sera bien évidemment partie prenante du projet Artemis, en coopération avec la NASA. À ce titre, elle pourra légitimement revendiquer la présence d’une ou d’un spationaute européen.

Il lui demande si la France est prête à laisser aux Allemands la première place dans les financements.

Il convient de garantir que la France bénéficiera d’une participation à la hauteur de son investissement consenti depuis des décennies dans ce domaine, et permettre en l’occurrence au spationaute Thomas Pesquet de participer à cette nouvelle étape de l’exploration spatiale humaine.

Aussi, il souhaite apprendre du Premier ministre le montant de la participation de la France à l’ESA, et si réellement la France entend céder à l’Allemagne sa place de leader européen spatial, en contradiction avec le discours du Gouvernement lors du 6e CoSpace.

Lire la réponse à la question (le 29/09/2020) :

Le Conseil ministériel de l’ESA qui s’est tenu à Séville les 27 et 28 novembre 2019 et a été co-présidé par la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, n’a pas fondamentalement remis en cause les équilibres entre les principaux États européens.

La France, notamment grâce à son budget national, tant dans ses composantes civiles que militaires, reste largement en tête au niveau européen dans le secteur spatial (effort institutionnel de 2,65 Md€ en 2020 – hors remboursement de la dette ESA – contre environ 1,4 Md€ pour l’Allemagne).

Le budget spatial français repose principalement sur le programme 193 « Recherche spatiale » via lequel est versée chaque année au CNES une subvention pour charges de service public et des crédits pour la contribution française aux programmes de l’ESA.

Le programme 193 couvre également la contribution française à Eumetsat (versée à Météo-France). Le budget spatial national est complété par des subventions du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA) et du programme 191 « Recherche duale », ainsi que par des projets délégués au CNES par le Ministère des Armées sur financement des programmes 144 Etudes amont, 146 Equipement des forces ou 178 Préparation et emploi des forces. Malgré un contexte économique tendu, le gouvernement a décidé à l’été 2019 de renforcer considérablement les budgets spatiaux pour la période 2020-2022, en allant au-delà de la loi de programmation initiale.

Ces budgets complémentaires ont permis, lors de la conférence ministérielle de Séville, de porter les nouveaux engagements de la France à l’ESA à hauteur de 2,65 Md€ sur la période 2020-2024, ce qui est supérieur ou égal à la plupart des conférences ministérielles précédentes.

En parallèle des décisions qui ont été prises pour les programmes de l’ESA, il convient de rappeler que le Gouvernement s’est également pleinement mobilisé pour sécuriser les budgets alloués au secteur spatial au niveau de l’Union européenne (budget spatial de l’UE, programme-cadre de recherche et d’innovation Horizon Europe). Enfin, preuve de l’engagement de l’État dans ce secteur stratégique, des suppléments budgétaires ont aussi été débloqués au niveau national au travers du PIA.

Au total, les montants engagés à l’ESA ainsi que les budgets nationaux prévus en complément pour les programmes décidés lors de la conférence ministérielle permettront de porter l’ensemble des nouveaux engagements contractuels de la France à environ 2,9 Md€ sur la période 2020-2024 soit l’équivalent du scénario intermédiaire qui avait été défini mi-2019 par le COSPACE. Sur cette période, près de 345 M€ seront alloués aux programmes d’exploration de l’ESA. Qu’il s’agisse de robotique martienne, de nouvelle station en orbite lunaire ou de vols habités à bord de la station spatiale internationale, ces missions jouent un rôle fondamental pour repousser les frontières de notre connaissance de l’histoire de l’Univers et de l’Humanité.

Au-delà des remarquables avancées scientifiques permises par les missions spatiales habitées, leur portée éducative et leur capacité à faire rêver des générations entières justifient pleinement les budgets engagés par la France à l’ESA en novembre 2019.

Ces budgets permettront également à Thomas Pesquet de voler à nouveau en 2021 ce qui renforcera en France la compréhension de l’intérêt du spatial pour le grand public et offrira de nombreuses opportunités de recherches innovantes à nos laboratoires.