L’état d’urgence sanitaire, toujours plus de violences policières

Le confinement était à peine entré en vigueur que les premières amendes étaient infligées aux contrevenants, témoignant de l’arbitraire dont usent certains membres des forces de l’ordre dans l’interprétation des règles édictées par le gouvernement. Pourtant les consignes étaient claires : pas de verbalisations le premier jour, mais de la pédagogie[1]. C’était sans compter sur certains agents de police qui ont profité de l’aubaine que constitue cette restriction sans précédent des libertés individuelles pour assouvir leurs penchants autoritaires. Or, les premiers écarts de forces de l’ordre ont laissé la place aux violences policières et à des dérives totalitaires intolérables.

Les violences policières continuent

J’y ai été confronté très directement dans ma circonscription. À Aubervilliers, une jeune femme a été violentée par des policiers lors d’un contrôle, alors qu’elle était sortie faire ses courses munie d’une attestation dans le quartier de la maladrerie. Je me suis exprimé et ai interpellé les autorités en demandant une enquête pour faire la lumière sur les faits et les responsables. Plus largement, de nombreux cas de violences policières ont été rapportés ces derniers jours dans de nombreuses villes et quartiers. Un salarié d’Amazon a porté plainte pour violences aggravées lors d’un contrôle de confinement aux Ulis. La scène a été filmée et largement diffusée sur les réseaux sociaux. Une autre vidéo, également virale, montre un individu frappé et gazé par des agents de police à Asnières. Mais ce ne sont que quelques exemples. Les faits se répètent au fil des jours.

Une mauvaise habitude en temps de crise

Les violences policières ne sont pas nouvelles et les 18 derniers mois ont été l’occasion pour la France entière de découvrir un phénomène qui était pourtant courant dans les quartiers populaires. Mais la particularité de celles qui se produisent ces derniers jours est leur motif. Elles se fondent sur un dispositif législatif et réglementaire. Il instaure une restriction massive des libertés individuelles au travers du confinement. Mais il est suffisamment vague pour générer de la confusion chez les citoyens et de l’arbitraire chez les autorités chargées de l’appliquer.

Les forces de l’ordre bénéficient ainsi d’un pouvoir considérable qui permet aux plus extrémistes d’assouvir leurs penchants autoritaires. Le gouvernement serait donc bien avisé de s’attaquer aux factieux qui évoluent au sein de ses forces de sécurité plutôt que d’aggraver les peines pour non-respect du confinement.

Des interprétations policières qui virent au totalitarisme

Le caractère vague et imprécis des conditions de déplacement dérogatoire offre aux autorités chargées de faire respecter le confinement un pouvoir d’interprétation beaucoup trop large. Il en va de même pour l’incertitude des citoyens sur les hypothèses ouvrant droit à une sortie de leur domicile. Et cette compétence discrétionnaire octroie aux forces de l’ordre un contrôle sur les déplacements de la population qui vire à l’arbitraire et révèle dans certains cas le penchant autoritaire de certains agents de police.

Des motifs de verbalisation ahurissants

La page internet « Verbalisée (parce que) » recense les motifs invoqués par des agents de police pour infliger une amende au titre de l’interdiction des déplacements. On peut notamment y lire qu’une femme a été verbalisée, car dans son sac de course, 2 paquets de gâteaux ont été considérés par l’agent comme ne relevant pas de produits de première nécessité. Mais, pire encore, une autre personne s’est fait verbaliser au motif que les serviettes hygiéniques ne constituent pas un produit vital. Mais où sommes-nous ? Certainement plus dans une réelle démocratie. Depuis quand les forces de l’ordre déterminent-elles les produits utiles et superflus ?

Un totalitarisme ? Oui, les mots ont un sens.

Le totalitarisme signifie un régime politique dans lequel le pouvoir impose son mode de pensée, sa vision dans l’ensemble des domaines de la vie des citoyens. Or la détermination, par les forces de l’ordre, du régime alimentaire, des habitudes de consommation ou des besoins vitaux de la population en constitue la pire manifestation. Il est du devoir du gouvernement de réagir et de fixer des règles claires à destination des policiers et des gendarmes. L’État d’urgence ne doit pas être mobilisé pour durcir la répression policière dont sont déjà victimes nombre de nos concitoyens.

Le « nazi » Lallement à la manœuvre

Mais au lieu de réagir, le gouvernement couvre les pires dérives de ses agents. Le dernier exemple date de vendredi. Le préfet de police de Paris, le « nazi » (selon Alain Juppé) Lallement a considéré « que ceux qui sont aujourd’hui hospitalisés (…) ce sont ceux qui au début du confinement, ne l’ont pas respecté. Il y a une corrélation très simple ». Que doivent penser les citoyens que l’État a exposés pendant des semaines, en ne prenant pas la mesure de l’épidémie, en ne mettant pas à disposition les masques, les tests nécessaires ? Et que doivent penser tous les salariés du privé, tous agents des services publics, qui travaillent tous les jours pour répondre aux besoins quotidiens de la population ? Eux, les caissiers, eux les soignants, et tant d’autres qui s’exposent à la maladie, et dont certains sont morts ! M. Lallement estime peut-être qu’ils sont eux aussi, responsables de leur sort.

Écœurant

Quelle indécence criminelle de la part d’un pouvoir dont la gestion maladroite de la crise expose les Français, et qui se défausse de ses responsabilités et insulte les citoyens par la bouche de M. Lallement ! Et ce sont les mêmes qui nous enjoignent à l’« unité nationale » ! Aucune remontrance de la part de sa hiérarchie. De simples excuses et l’on passe à autre chose. Le ministre Castaner lui a même renouvelé sa confiance. Le message est clair. Toutes les dérives sont tolérées, tous les excès permis. Nous sommes bien loin d’un état de droit.

Le gouvernement démontre tous les jours un peu plus son appétence pour l’autoritarisme. Laisser à ses éléments de répression de la population une liberté totale dans l’application des mesures restrictives en est une preuve supplémentaire.