Question écrite sur la faim en Seine-Saint-Denis

Le 19 mai 2020, Bastien Lachaud demandait au gouvernement quand un plan d’urgence de lutte contre la faim allait enfin être déployé, alors que la crise du covid-19 a appauvrit un grand nombre de foyers. La Seine-Saint-Denis a été particulièrement touchée par ce drame social, et le reste encore. Des mesures doivent-être prises.

M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur la faim en Seine-Saint-Denis. « Les gens ont faim » : voilà ce que disent aujourd’hui les bénévoles associatifs en Seine-Saint-Denis. Car en Seine-Saint-Denis, le coronavirus ne tue pas seulement davantage qu’ailleurs. L’épidémie et ses conséquences plongent aussi de nombreux habitants déjà fragiles dans une précarité plus grande encore. Dans un département où près de 28 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté (deux fois la moyenne nationale !), la crise sanitaire se double d’une crise sociale, une crise d’une gravité telle qu’elle est d’abord une crise alimentaire. Avoir faim, se demander comment l’on va nourrir sa famille : la question hante aujourd’hui le quotidien de milliers d’habitants du département. Partout les files d’attente s’allongent devant les points de distribution alimentaire. Le nombre des demandes aux centres communaux d’action sociale explose. Les personnes concernées ne sont pas seulement les mêmes qu’avant le confinement : de nombreuses familles qui n’y avaient pas recours n’ont d’autre choix que de solliciter l’aide alimentaire et menacent de tomber dans la pauvreté. Le préfet de la Seine-Saint-Denis lui-même estimait récemment que 15 000 à 20 000 personnes risquent d’avoir du mal à se nourrir. Beaucoup d’autres le peuvent encore, mais seulement au prix de choix déchirants, de privations indicibles. Que M. le ministre entende le témoignage d’une habitante d’Aubervilliers, dans la circonscription de M. le député : « Mon mari est intérimaire, depuis la mi-mars il ne gagne plus rien. Nous ne touchons plus que les allocations pour les enfants. Je ne payerai pas mon loyer en avril. Ma priorité est de nourrir mes trois enfants ! ». Comment peut-on accepter cela aujourd’hui en France, dans la 6ème puissance économique mondiale ? Depuis début mars 2020, c’est avant tout la générosité et l’élan de solidarité de la population, des associations, qui a permis de faire face à l’urgence. Pour beaucoup d’habitants, les distributions de paniers repas, de produits de première nécessité, le soutien humain aussi, ont constitué une aide cruciale, souvent la seule. Il faut rendre hommage à toutes celles et ceux qui se sont engagés sans compter. Mais ces dons volontaires ne suffisent pas à eux seuls, d’autant que les séquelles sociales de la crise seront durables. C’est à l’État de prendre ses responsabilités et d’agir massivement pour protéger toutes celles et ceux qui en ont besoin. Or le Gouvernement ne prend pas la mesure de l’urgence sociale qui frappe la Seine-Saint-Denis. C’était déjà le cas avant la crise : le « plan » pour le département annoncé par le Premier ministre en octobre 2019 n’était pas à la hauteur. La surdité de M. le ministre est plus grave encore aujourd’hui. L’aide exceptionnelle de 150 euros et de 100 euros par enfant qu’il a annoncée, versée une seule fois aux foyers les plus modestes, ne suffit pas, pas plus que l’enveloppe de 39 millions d’euros destinée aux associations chargées de l’aide alimentaire et à la distribution de chèques d’urgence alimentaire. M. le ministre ne peut-il vraiment pas faire plus, quand l’État a débloqué, par exemple, 7 milliards d’euros de prêts pour Air France-KLM ? Les mesures qui pourraient être prises immédiatement sont pourtant simples. M. le député les a proposées au Premier ministre dans un courrier : encadrer les prix des produits alimentaires de première nécessité ; doubler la prime aux ménages les plus modestes et la pérenniser jusqu’à la fin de la crise ; mettre en place un soutien vraiment massif de l’État aux collectivités locales et aux associations ; suspendre les loyers des personnes en difficulté en compensant les bailleurs. M. le député pourrait continuer. Sa question est donc simple. Quand M. le ministre va-t-il prendre la mesure de la crise et de ses conséquences sociales ? Quand M. le ministre va-t-il déployer un vrai plan d’urgence, pour que des milliers de personnes, y compris d’enfants, n’éprouvent pas la faim, aujourd’hui, en Seine-Saint-Denis, aux portes de Paris ? Il souhaite connaître son avis sur ces sujets.