Le permis de conduire est souvent essentiel pour la vie quotidienne, que l’on habite à la campagne, en périphérie des villes, ou simplement besoin de se déplacer pour aller travailler. L’offre des transports en commun du quotidien ne permet souvent pas de s’en passer.
Mais malgré son importance, les délais de passage de l’examen du permis de conduire sont parfois très longs. En autorisant les auto-écoles low cost le gouvernement a instauré un permis de conduire à deux vitesses. Ceux qui n’ont pas les moyens de payer les auto-écoles sont pénalisés pour repasser l’épreuve en cas d’échec. Les auto-écoles sont concurrencées, ce qui met en péril leur pérennité dans certains endroits.
Question écrite au gouvernement, posée le 05/10/2021 :
M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre des Transports sur l’engorgement du passage de l’épreuve pratique du permis de conduire, et sur les délais d’attente que doivent subir les candidats libres qui se présentent à l’examen.
L’obtention du permis de conduire est un élément essentiel pour la vie quotidienne. Il est une des conditions d’accès à l’autonomie pour les jeunes. Dans nombre de situations, il est indispensable pour pouvoir décrocher un emploi, puis se rendre au travail. C’est particulièrement vrai dans les territoires ruraux, mais aussi des zones de banlieue des villes où il n’y a ni transports en commun, ni services publics accessibles à pied ou en vélo, et aucune solution à part la voiture pour aller faire ses courses dans les centres également situés dans des zones d’activité à l’extérieur des villes.
Toutefois, malgré le caractère crucial de l’accès au permis de conduire, il existe dans de nombreux départements un engorgement des services conduisant à un allongement des délais pour présenter l’épreuve pratique. Cela vaut pour les auto-écoles classiques, mais tout particulièrement pour les auto-écoles dites « low cost », qui n’ont pas d’agence dans les départements, et qui fonctionnent beaucoup via internet. Celles-ci attirent les personnes ayant peu de moyens par des tarifs bien plus bas que les auto-écoles classiques. Elles annoncent des forfaits pour l’apprentissage du code et la conduite autour de 700 €, contre souvent plus de 1 200 € pour des auto-écoles classiques.
Toutefois, les personnes suivant ces cursus doivent s’inscrire en tant que candidats libres pour les épreuves du permis de conduire. L’arrêté du 21 juillet 2016, fixant la méthode nationale d’attribution des places d’examen du permis de conduire, précise dans son article 4 que « Les places d’examen sont accordées aux candidats libres se présentant pour la première fois dans un délai qui ne saurait être supérieur à deux mois, et dans le délai d’attente moyen constaté entre la première et la deuxième présentation dans le département pour ceux ayant échoué une première fois. Ce nombre de places doit permettre d’offrir à l’ensemble des candidats un égal accès aux épreuves, indépendamment des conditions dans lesquelles ces derniers ont été formés. »
Le délai de présentation à une première tentative excède toutefois dans nombre de départements le délai théorique de 2 mois. Le délai d’attente pour une 2e tentative pour s’avérer encore plus long, les candidats se voient répondre que les élèves inscrits en auto-école traditionnelle étant prioritaires. Aussi, en cas d’échec, ce sont les personnes les plus précaires qui doivent attendre le plus longtemps. 6 mois, un an peuvent passer sans nouvelle date pour se présenter à l’épreuve.
Ces délais constituent une rupture d’égalité considérable dans l’accès à un examen public par rapport aux résidents d’autres départements où les délais sont plus courts. Les délais d’attente ne sont pas seulement contraignants, ils sont également coûteux pour les candidats, qui doivent payer de nouvelles leçons pour ne pas perdre leur maîtrise du véhicule faute de pratique. Cela est particulièrement discriminant pour les personnes qui ont déjà du mal à financer leurs leçons de conduite, et renforce le stress à l’examen. Le fait d’attendre aussi longtemps contrevient à la liberté fondamentale d’aller et venir, et dans certain cas à celle de travailler, au vu du caractère indispensable de la voiture dans de nombreux départements.
Dans certains départements, des difficultés conjoncturelles vont allonger significativement les délais. Ainsi dans l’Yonne en 2019, des arrêts maladie ont eu pour conséquence des annulations d’examens en cascade, faute de pouvoir trouver des remplaçants.
L’engorgement s’est encore aggravé, suite aux confinements liés au Covid-19. Entre le 16 mars et le 8 juin 2020, plus de 350 000 candidats n’ont pas pu passer le permis, selon le ministère de l’Intérieur. La plateforme Candilib, qui était censée résoudre les difficultés d’accès à l’examen, n’a pas permis, loin s’en faut, de faire face à cet engorgement. Pire, des pratiques d’accaparement frauduleux de l’inscription à l’examen ont prospéré sur la pénurie, des escrocs faisant payer aux candidats l’inscription sur une plateforme supposée gratuite.
Le lancement d’une nouvelle plateforme, « Rendez-vous permis » en juin, suite à une expérimentation menée en Occitanie, n’a pas, non plus, permis de résoudre les problèmes. En effet, le problème principal est la pénurie de places d’examen. La réforme conduit en plus les auto-écoles traditionnelles à leur tour à de grandes difficultés pour présenter leurs candidats, alors que ces établissements ont été durement touchés par la crise du coronavirus.
La coexistence de ces deux systèmes en concurrence pose problème, car les personnes avec peu de moyens financiers sont contraints d’opter pour les solutions les moins chères. Mais celles-ci risquent de les contraindre à des délais considérables. Le permis à deux vitesses se fait au détriment des plus pauvres.
Aussi, M. Bastien Lachaud souhaite-t-il savoir ce que le ministre compte faire pour augmenter significativement le nombre de places de l’épreuve pratique du permis de conduire, afin de résoudre l’engorgement, et permettre ainsi aux personnes qui souhaitent passer l’examen de le faire dans des délais raisonnables.