Répression policière au Campus Condorcet

Question écrite au gouvernement, le 07/02/2023 : Monsieur le député Bastien Lachaud interroge monsieur le ministre sur la politique de répression disproportionnée et préventive menée à l’égard des étudiantes et étudiants mobilisées, dans le cadre du mouvement de protestation contre la réforme des retraites.  Le mardi 23 janvier dernier, 30

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Question écrite au gouvernement, le 07/02/2023 :

Monsieur le député Bastien Lachaud interroge monsieur le ministre sur la politique de répression disproportionnée et préventive menée à l’égard des étudiantes et étudiants mobilisées, dans le cadre du mouvement de protestation contre la réforme des retraites. 

Le mardi 23 janvier dernier, 30 étudiants qui avaient brièvement occupé l’espace associatif et culturel du Campus Condorcet, à Aubervilliers, dans la circonscription d’élection de monsieur Lachaud, ont fait l’objet d’un placement en garde à vue, dans différents commissariats de Seine-Saint-Denis, à Stains, Aubervilliers, Épinay-sur-Seine et Saint-Denis, pour une durée de 22 heures. Les témoignages des intéressés font état de conditions de garde à vue inhumaines, de propos insultants ou sexistes et de menaces, d’humiliations et de mauvais traitements.

Les motifs justifiant l’intervention des forces de police interrogent et apparaissent tout à fait contestables, au vu des faits, tels qu’ils ont été reconstitués par plusieurs organes de presse. Les forces de police sont intervenues une vingtaine de minutes seulement après le début de l’occupation, semble-t-il sur sollicitation de la présidence du Campus Condorcet, et ont procédé à l’évacuation du lieu concerné. Aucune infraction n’a pu être imputée aux étudiants concernés. Aucun fait précis ne semble leur être reproché. Ceux-ci ont d’ailleurs été relâchés par la suite, sans que la présidence du campus ait déposé plainte et sans qu’aucun motif de poursuite ne leur soit notifié. L’occupation, qui n’a duré que vingt minutes, semble ainsi s’être déroulée de manière absolument pacifique et n’avoir donné lieu à aucun trouble à l’ordre public ou fait de violence ou de dégradation, qui justifierait le recours à la force publique. 

Dès lors, l’intervention des forces de police semble avoir visé non pas à réagir à un trouble avéré à l’ordre public, mais seulement à empêcher, de façon préventive, toute occupation ou manifestation revendicative au sein du campus. Une telle intervention aurait ainsi un caractère manifestement disproportionné et une légitimité contestable.

Elle contreviendrait à la liberté d’expression politique à l’université, telle que la définit l’article L811-1 du code de l’éducation, qui dispose que les usagers du service public de l’enseignement supérieur « disposent de la liberté d’information et d’expression à l’égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels. Ils exercent cette liberté à titre individuel et collectif, dans des conditions qui ne portent pas atteinte aux activités d’enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l’ordre public ». Elle remettrait également en question la franchise universitaire, qui confère un statut particulier aux établissements universitaires et restreint de fait l’intervention des forces de police en leur sein. Elle représenterait, ce faisant, une atteinte préoccupante aux libertés publiques. 

Les faits survenus au campus Condorcet sont d’autant plus préoccupants qu’ils n’apparaissent pas isolés. Dans le contexte du mouvement de contestation contre la réforme des retraites que connaît notre pays en ce début d’année 2023, des faits similaires sont survenus le 19 janvier dernier, sur le campus universitaire de l’Esplanade à Strasbourg, où étudiants et syndicats des personnels dénoncent l’intervention immédiate et sans fondement des forces de police pour procéder à l’évacuation d’un bâtiment où se tenait, pacifiquement, une Assemblée Générale. Plus largement, depuis plusieurs années, personnels de l’enseignement supérieur et étudiants dénoncent la multiplication des atteintes à leur liberté d’expression politique et l’installation d’un climat répressif visant à entraver le droit à se mobiliser au sein de lieux d’études. 

Monsieur le député ne peut que s’inquiéter de telles atteintes et partager les craintes légitimes qui s’expriment au sein de la communauté académique.

Il souhaite donc connaître les faits précis qui ont motivé l’intervention des forces de police au sein du campus Condorcet le 23 janvier dernier. Il souhaite obtenir la lumière sur les conditions de détention des étudiants mis en garde à vue, sur d’éventuels abus qui auraient été commis à cette occasion, et, si les faits étaient avérés, sur les sanctions qui doivent être prises à l’égard des fonctionnaires de police responsables de tels manquements. Plus largement, il souhaite apprendre de monsieur le ministre quelles dispositions il compte prendre pour éviter tout emploi disproportionné et injustifié de la force public et garantir la liberté d’information et d’expression politique au sein des établissements de l’enseignement supérieur. 

Réponse, publiée le 20/06/2023 :

Le 23 janvier dernier, des individus cagoulés ont pénétré illicitement dans les locaux de l’espace associatif et culturel du campus Condorcet situé à Aubervilliers (93), et ont dégradé les caméras de surveillance.

Les policiers, dépêchés sur place à la suite du déclenchement d’une alarme, ont fait cesser les dégradations puis interpellé 29 individus se trouvant dans l’enceinte du campus, pour la plupart avec le visage dissimulé. Ces personnes ont ensuite été placées en garde à vue pour dégradations volontaires de biens publics en réunion et dissimulation volontaire du visage sans motif légitime lors d’une manifestation sur la voie publique.

Elles ont été informées des droits inhérents à la mesure de garde à vue, conformément aux dispositions du code de procédure pénale. Il convient de noter que 2 des individus se trouvaient en possession d’armes (un couteau et un cran d’arrêt), et que 8 des mis en cause ont refusé de décliner leur identité.

L’autorité judiciaire a donc autorisé la signalisation d’identité sous contrainte. Par ailleurs, des violences ont été commises à l’encontre d’un policier lors des transfèrements. Celui-ci a déposé plainte.

Le 24 janvier en début de soirée, le Parquet de Bobigny a ordonné la poursuite de l’enquête dans un cadre préliminaire, aux fins de recueillir les plaintes de l’université et d’évaluer les dégâts causés.

Les mis en cause ont été remis en liberté.

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