Le 2 octobre 2018, j’attirais l’attention du ministre de l’Intérieur sur les cas rapportés de placement d’enfants étrangers dans des foyers de l’enfance, comme moyen de pression à l’encontre des parents, afin que celles-ci quittent le territoire ou perdent leur garde. Voici ma question :
M. Bastien Lachaud alerte M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, sur la situation des enfants étrangers placés en foyers de l’enfance. Selon un faisceau de témoignages émanant de personnels parisiens des foyers de l’enfance, des enfants en bas âge, de nationalité syrienne et roumaine feraient l’objet d’interpellations systématiques et d’un placement quasi arbitraire, principalement destiné à faire pression sur leurs parents. Retirés à des parents en situation de grande précarité, vivant dans des camps ou pratiquant la mendicité, ces enfants serviraient d’instrument de pression, leurs parents étant incités à quitter le territoire français sous peine de se voir définitivement retirer la garde. Le nombre de tels cas se serait multiplié au cours de l’année 2018. Ces faits, s’ils ne sont pas encore établis de façon irréfutable, ne peuvent cependant, à tout le moins, que susciter interrogations et inquiétudes. Et ce a fortiori dans un contexte où des cas de comportements à la limite de l’illégalité adoptés par les autorités judiciaires et policières afin d’accélérer des procédures d’expulsion ont déjà été révélés par le passé. Pour ne donner qu’un exemple, le travail de la presse et d’associations de défense des droits avait en 2016, produit des éléments laissant penser que le procureur de la République de Montpellier et la préfecture de l’Hérault avaient établi un système de PV de connivence permettant de multiplier et d’accélérer les procédures de renvoi, au prix de violations du droit. L’on ne saurait souligner suffisamment la gravité de cette situation, si jamais elle était avérée. La séparation brutale entre parents et enfants confronte ces familles à des situations inhumaines, avec des conséquences psychologiques particulièrement lourdes pour des enfants en bas âge. Seule une situation de danger ou d’impossibilité absolue d’assurer la garde justifierait une telle séparation. Il serait naturellement inconcevable qu’un mineur étranger, lui-même non expulsable, soit utilisé comme instrument de pression pour accélérer l’éloignement de ses parents du territoire. C’est pourquoi il souhaiterait apprendre de sa part s’il dispose d’informations à ce sujet et comment il compte, le cas échéant, agir pour éviter que surviennent pareilles situations inhumaines, et, a fortiori, sanctionner tout manquement au droit qui pourrait survenir dans ce cadre.
Le 24 septembre 2019, le ministre de la Justice répondait, de manière générale et sans répondre réellement à mon interrogation :
Le démantèlement des campements illégaux et bidonvilles, est mené dans le respect des lois de la République, suite à une décision de justice ou de police administrative. Une circulaire encadre ces opérations de démantèlement, en demandant au représentant de l’Etat dans les départements de mettre en œuvre des solutions d’accompagnement dans les différents domaines concourant à l’insertion des personnes. Dans ces circonstances, le placement d’un enfant peut être prononcé par le juge des enfants dans un cadre civil, en application des articles 375 et suivants du code civil, dans le but de protéger l’enfant d’une situation de danger. La procédure d’assistance éducative s’applique de la même manière à tous les mineurs se situant sur le territoire national, sans prise en compte de leur nationalité. Les décisions relèvent uniquement du pouvoir d’appréciation des juges des enfants, juges du siège, qui prennent leurs décisions en stricte considération de l’intérêt de l’enfant, sur la base d’éléments objectifs de danger relevés par les services éducatifs. Ils sont tenus d’entendre les parents et les enfants capables de discernement qui peuvent chacun se faire assister par un avocat. Le code civil circonscrit l’action du juge en prévoyant notamment que « chaque fois qu’il est possible, le mineur doit être maintenu dans son milieu actuel » (article 375-2) et qu’un placement peut être prononcé « si la protection de l’enfant l’exige ». Il convient de préciser que « les père et mère de l’enfant bénéficiant d’une mesure d’assistance éducative continuent à exercer tous les attributs de l’autorité parentale qui ne sont pas inconciliables avec cette mesure » (article 375-7). Enfin, toute décision de placement prise par le juge des enfants est susceptible de recours, les voies de recours constituant le seul moyen de contester une décision judiciaire. Dans ce cadre, lorsqu’ils estiment que le placement aurait des conséquences graves pour leur enfant, les parents peuvent saisir en référé le premier président de la cour d’appel aux fins de voir suspendre l’exécution provisoire qui assortit habituellement les décisions d’assistance éducative.