Que de temps perdu pour l’égalité de toutes les femmes devant la PMA ! Combien de projets parentaux qui ont dû être abandonnés ? Combien de femmes qui ont dû renoncer à la maternité ou se résoudre à aller à l’étranger, avec de lourds sacrifices financiers !
Mais l’égalité ne sera pas accomplie avec cette loi. Des discriminations des couples de femmes, des femmes célibataires, et des personnes transgenres persistent au niveau de la filiation.
Les personnes transgenres demeurent exclu.es de l’accès à la PMA.
Les opérations sur les enfants intersexes sont abordées dans le projet de loi, mais la liberté de disposer de son corps, comme l’intégrité physique du corps ne sont pas garantis. Au contraire, un parcours de soins est organisé, pour des enfants qui ne sont pas malades, et qui ont des variations saines du vivant.
LREM veut donner des gages de progressismes avec cette loi, pouvoir dire, à un an du terme du mandat présidentiel qu’ils ont accompli « une grande réforme sociétale ». Mais ils ont voulu donner des gages à une conception figée et réactionnaire des familles. L’égalité devra malheureusement encore attendre.
L’égalité devra encore attendre aussi pour la filiation !
LREM fait passer la question de la PMA dans la loi de bioéthique, alors que ça n’a rien à y faire, et après se plaint qu’on ne puisse y aborder l’égalité de toutes les familles, parce que c’est un texte de bioéthique…
Il aurait été plus simple et plus juste de faire un texte d’égalité des familles, qui aurait permis d’ouvrir les techniques de PMA à toutes les personnes qui souhaitent porter un enfant. Mais c’est eux qui ont refusé de le faire !
Ils ont beau jeu de parader sur twitter et de faire de grandes déclarations sur la lutte contre les discriminations des personnes LGBT, mais quand il s’agit de voter, LREM fait tout le contraire. Hypocrisie totale !
Lire le texte de son intervention en discussion générale de la loi de bioéthique, pour la 3e lecture :
Monsieur le Président, Messieurs les Ministres, Mes chers collègues,
Combien de femmes ont dû renoncer à avoir un enfant depuis la promesse de l’adoption de la PMA pour toutes les femmes ? Combien de projets parentaux déçus ? Combien d’enfants séparés de leur mère parce que le lien juridique entre eux n’a pas pu être reconnu à temps, causant d’indicibles souffrances aux enfants comme aux parents ?
Aujourd’hui, la PMA place les femmes lesbiennes et les femmes célibataires dans la même situation que celles qui devaient aller avorter à l’étranger avant la légalisation en France. Il y a celles qui ont les moyens. Celles qui ne les ont pas.
Toutes partagent le vécu insupportable que la société leur dénie les possibilités d’enfanter auxquelles d’autres femmes ont accès. Le fait que leur orientation sexuelle ou leur statut marital les exclut. Qu’on leur dénie le droit de décider pour leurs corps, pour leurs familles, pour leurs vies. Que la société aide d’autres femmes à avoir des enfants, mais pas elles.
Cette discrimination selon l’orientation sexuelle et le statut marital pourrait enfin prendre fin, et le plus tôt sera le mieux.
Enfin le projet de loi de bioéthique revient à l’Assemblée nationale, pour une adoption définitive espère-t-on avant la fin de ce quinquennat. Il est plus que temps !
Mais pour certaines il est déjà trop tard, car le temps que le politique tienne ses promesses, elles ont dépassé l’âge fatidique.
Ces questions, d’ailleurs, n’ont rien à faire dans une loi de bioéthique. Il aurait été plus juste et rapide de les traiter dans une loi d’égalité sur les questions familiales, car il y a fort à faire. Le refus du gouvernement fait que malheureusement, cette loi ne mettra pas fin aux discriminations tout court. Car si toutes les femmes pourront enfin avoir accès à la PMA, la loi persiste à figer des discriminations qui n’ont pas lieu d’être, à dicter de façon pernicieuse comment devraient être les familles. Non !
La loi doit protéger toutes les familles, dans leur diversité, et n’a pas à dire aux unes et aux autres comment ils ou elles doivent vivre.
En matière d’assistance médicale à la procréation, il faut respecter le libre choix de la personne de porter son enfant, et ouvrir ces techniques aux personnes qui en font la demande.
Il est absurde de continuer à discriminer les demandes selon le sexe à l’état civil des personnes concernées. Parce qu’un homme transgenre, seul ou en couple, aurait fait le choix d’avoir son état civil conforme à son identité de genre, il devrait renoncer à un projet parental ? S’exposer à tous les risques d’une « PMA artisanale » ? Continuer à aller à l’étranger ?
Mais la même personne qui n’aurait pas fait ce changement pourrait accéder à la PMA ?
Il n’y aurait d’ailleurs aucun changement fondamental, puisque ces familles existent déjà. Depuis 2016, des personnes transgenres peuvent avoir des enfants et fonder des familles, car il n’est plus besoin de donner une preuve de stérilisation pour changer son sexe à l’état civil. Le problème est que la loi ne le prévoit pas, ce qui provoque une grande insécurité juridique pour l’établissement de la filiation. On en arrive à l’absurdité totale où les parents biologiques ne peuvent établir leur filiation avec leurs propres enfants, uniquement parce qu’ils ou elles ont changé leur sexe à l’état civil.
Nous avons déposé des amendements pour mettre fin à cette absurdité, car de toute façon s’ils ne sont pas adoptés maintenant, il faudra y revenir, donc autant ne pas prolonger d’autant l’insécurité juridique de ces familles au nom d’une conception étriquée de l’identité de genre.
Sur la filiation, il faut cesser tous ces salmigondis qui cherchent à ménager deux options contradictoires : soit l’égalité, ce que nous prônons, soit la discrimination, ce que d’autres défendent. Et bien nous devons choisir l’égalité ! Les femmes ne doivent pas avoir des droits différents selon qu’elles sont en couple avec un homme ou une femme.
Donc la filiation pour les couples de femmes doit pouvoir se faire dans les mêmes conditions que pour les couples composés d’un homme et d’une femme. Dans les mêmes conditions.
Le ministre a eu beau jeu de dire sur twitter « La lutte contre l’homophobie et la transphobie est un combat de chaque jour. À nous, politique ou citoyen, de le poursuivre. Améliorer les parcours de transition, supprimer la discrimination dans l’accès à la PMA, interdire les thérapies de conversion : avançons ! » lors de la journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie.
Mais le même ministre dit le contraire quand il s’agit de lutter concrètement contre l’homophobie et la transphobie inscrite dans la loi. Il est encore temps de changer d’avis et de mettre la loi en conformité avec le tweet : avançons !
Enfin, je voudrais revenir sur la question des opérations non consenties sur les personnes intersexes. L’article 21 bis a été voté conforme par le Sénat, aussi nous ne pouvons pas y venir par voie d’amendement. Toutefois, je pense que le travail législatif sur ce sujet n’est pas achevé, et qu’il faudra y revenir. Car les principes éthiques ne sont pas clairs. La loi interdit déjà les mutilations. Mais la loi de bioéthique organise un parcours de soin pour des enfants qui ne sont pas malades, qui présentent des variations saines :
alors oui, l’abstention thérapeutique est mentionnée comme une possibilité. Mais elle devrait être la règle, en dehors des cas d’urgence vitale. Le principe éthique est simple : liberté de disposer de son corps, et respect de l’intégrité du corps. Or, malgré nos nombreux amendements, ces principes ne sont pas inscrits dans la loi de bioéthique. Le recueil du consentement libre et éclairé de la personne concernée, personnellement exprimé, préalablement à toute opération sans urgence vitale, n’est pas imposé.
En somme, cette loi de bioéthique est conçue pour racheter une bonne conscience au quinquennat Macron, pour présenter une grande loi « sociétale ».
Donner des gages de « progressisme » aux électeurs qui ont cru à ce mirage. Et opportunément le débat vient se finir peu de temps avant l’élection présidentielle. Mais que de temps perdu ! Combien de femmes dont le corps a été instrumentalisé à des fins d‘électoralisme ? Combien de familles devront encore attendre avant que la loi proclame l’égalité réelle en droit ?