Question écrite au gouvernement, posée le 05/10/2021 :
M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre de l’intérieur sur la situation matérielle des locaux et les conditions de garde à vue au sein des services de la police. L’état de vétusté et de dégradation des locaux des commissariats de police constitue un problème pointé de longue date par de nombreux acteurs, au premier rang desquels les syndicats des policiers. La situation des cellules de garde à vue semble présenter un caractère d’urgence particulier.
Dès son premier rapport annuel d’activité, en 2008, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) soulignait que « les cellules de garde à vue (et aussi de dégrisement) sont les lieux les plus médiocres des locaux administratifs les plus médiocres ». Douze ans après, un récent rapport de la même instance, publié au Journal officiel le 21 septembre 2021 et qui s’appuie sur des visites de contrôle réalisées dans dix-sept commissariats de police, dresse un constat tout aussi accablant : « Les visites réalisées par le CGLPL au cours de ces derniers mois ont, à de très rares exceptions près, mis en avant la totale indignité des conditions d’accueil dans les locaux de garde à vue et de dégrisement de la police nationale ».
Le rapport pointe l’état particulièrement dégradé des locaux situés à Paris et en Seine-Saint-Denis. Pour avoir visité à plusieurs reprises les deux commissariats situés dans sa circonscription à Aubervilliers et Pantin, M. le député ne peut que rejoindre et partager cette observation ; le commissariat d’Aubervilliers fait d’ailleurs partie des 17 lieux ayant fait l’objet d’une visite de contrôle du CGLPL. Plus avant, ce dernier pointe le caractère « inadapté » et « sous-dimensionné » des locaux, qui vient s’ajouter une « absence totale de prise en compte des sujets portant sur l’hygiène (nettoyage des cellules, matelas, couvertures, distribution effective des kits d’hygiène, accès au gel hydroalcoolique, renouvellement des masques, etc.) ».
Une situation d’autant plus grave en période de pandémie et crise sanitaire et que le CGLPL juge « attentatoire à la sécurité des personnes privées de liberté », dès lors que les précautions sanitaires prescrites à l’ensemble de la population ne peuvent être appliquées et que les personnes privées de liberté se trouvent ce faisant exposées au risque de contamination par la covid-19. Brossant le tableau d’une situation inacceptable et qui ne fait qu’empirer depuis plus d’une décennie en dépit de nombreuses alertes, le CGLPL pointe une absence de volonté politique de la part du ministère de l’intérieur, qui n’a pris « aucune disposition » « pour y remédier ».
La réponse que le ministre de l’intérieur a adressée au CGLPL, en date du 16 septembre 2021, semble conforter ce constat. Le ministre se borne en effet pour l’essentiel à contester la réalité du constat dressé par CGLPL, dont il affirme qu’il repose sur un nombre insuffisant de visites de contrôle, trop faible pour être représentatif et à rappeler les mesures qui auraient d’ores et déjà été prises pour améliorer la situation. M. le député ne peut se satisfaire de cette réponse, qui semble constituer une forme de déni, alors que le CGLPL fait précisément le constat, soigneusement étayé, de l’insuffisance des dispositions prises jusqu’alors.
C’est pourquoi M. le député souhaite rappeler à M. le ministre que la situation matérielle des locaux et les conditions de garde à vue au sein de la police nationale doivent représenter une préoccupation importante du ministère de l’intérieur. Il s’agit tout autant d’assurer le respect de l’obligation légale et éthique de bien traiter les personnes gardées à vue que de garantir de bonnes conditions de travail pour les femmes et les hommes de la police nationale qui évoluent quotidiennement dans ces locaux. M. le député souhaite donc apprendre de M. le ministre quelles mesures concrètes il compte prendre dans ce sens. Puisque M. le ministre conteste le constat établi par le CGLPL qu’il juge insuffisamment étayé, M. le député souhaite savoir si et quand il compte organiser un grand audit national des locaux de la police nationale et en particulier des lieux de garde à vue. Puisque M. le ministre conteste le constat établi par le CGLPL qu’il juge insuffisamment étayé, M. le député souhaite avoir connaissance des éléments à la connaissance du ministre qui justifient de cette contestation. Il souhaite enfin connaître la position précise de M. le ministre relativement aux six « recommandations » principales formulées par le CGLPL dans son rapport et les mesures exactes qu’il compte prendre pour en tenir compte. Plus généralement, il souhaite savoir quelles dispositions supplémentaires M. le ministre envisage de prendre pour garantir des conditions de garde à vue et des conditions de travail et d’accueil décentes dans l’ensemble des locaux de la police nationale, tant à court terme (conditions d’hygiène, dotation en matériel sanitaire, contrôles annuels réalisés par le procureur) qu’à moyen et long terme (rénovation des locaux et questions immobilières).