Il faut pérenniser l’alternative végétarienne dans la restauration scolaire

Les projets de révision de l’arrêté encadrant la restauration scolaires menacent les alternatives végétariennes.

Sous la pression du lobby de la viande, le gouvernement pourrait imposer des quantités minimales de viande par mois, alors qu’il est parfaitement possible de composer des plats végétariens équilibrés et de bonne qualité nutritionnelle.

Question écrite au gouvernement :

M. Bastien Lachaud interroge M. le Ministre l’Education nationale sur la possible interdiction des options végétariennes quotidiennes dans la restauration scolaire.

En effet, un projet de révision de l’arrêté du 30 septembre 2011 relatif à la qualité nutritionnelle des repas servis dans le cadre de la restauration scolaire, pourrait imposer une fréquence minimale de viande et de poisson chaque mois dans les cantines. Si cette piste était poursuivie, il deviendrait impossible de proposer un menu végétarien quotidiennement.

Selon l’association Greenpeace, les ministères de l’Agriculture, de la Transition écologique et de la Santé veulent « imposer une fréquence minimale obligatoire de consommation de viande et de poisson » tous les mois. L’association analyse que « dans les établissements où l’option végétarienne doit être choisie au trimestre ou à l’année — soit la quasi-totalité des cantines de maternelle ou primaire —, cette fréquence ne pourrait pas être respectée ». En effet, il deviendrait obligatoire d’inclure un repas carné au moins une fois par semaine, ce qui de fait interdit une alternative végétarienne quotidienne.

Pourtant, la législation en vigueur cherche également à faire baisser la part de protéines carnées dans la restauration scolaire, notamment les dernières lois Egalim et Climat et Résilience, qui imposent un repas végétarien hebdomadaire et permettent l’expérimentation du repas quotidien végétarien.

Il n’est pourtant plus à démontrer que le régime végétarien permet parfaitement d’apporter les nutriments nécessaires, notamment en matière de protéines, et l’ANSES affirme même que les apports en protéines sont de toute façon trop importants, dans un rapport publié fin 2021.

Aussi, M. Bastien Lachaud souhaite-t-il savoir ce que le ministre compte faire afin de pérenniser et sécuriser la possibilité de mettre en place une alternative végétarienne quotidienne dans la restauration scolaire, face au lobby de la viande, dans un premier temps. Plus généralement, il souhaite savoir ce qu’il compte faire afin de généraliser les alternatives végétariennes, les plats issus de l’agriculture biologique et de circuits courts, ainsi que la limitation des aliments ultra-transformés, dans la restauration scolaire et collective.

Lire la réponse, publiée le 21/03/2023 :

L’arrêté du 30 septembre 2011 relatif à la qualité nutritionnelle des repas servis dans le cadre de la restauration scolaire, pris en application de l’article L. 230-5 du code rural et de la pêche maritime, fixe des règles concernant la structure des repas, les fréquences de services et les grammages des produits « prêts à consommer » en restauration scolaire. Selon ce cadre, il est déjà actuellement, et depuis 2011, obligatoire de servir du poisson lors de 4 repas et de la viande rouge non hachée lors de 4 repas sur 20 repas successifs. En cas de choix multiple de menus, les fréquences sont calculées de manière proportionnelle par rapport au nombre de choix.

Il est donc possible, et ceci depuis 2011, de servir une option végétarienne quotidienne en cas de choix multiple. De même, certaines collectivités ont mis en place une option végétarienne sur réservation au jour le jour quelques jours à l’avance, ce qui s’apparente à un choix multiple prévu par l’arrêté actuel.

En revanche, le cadre existant ne permet pas une inscription à une option végétarienne à l’année ou au trimestre car, de fait, les élèves inscrits à cette option n’auront pas la possibilité de consommer de la viande ni du poisson pendant une année ou un trimestre. La loi climat et résilience d’août 2021 pérennise le menu végétarien hebdomadaire et prévoit une expérimentation de 2 ans pour les collectivités territoriales volontaires qui souhaitent « proposer quotidiennement le choix d’un menu végétarien ».

Ces mesures sont d’ores et déjà cohérentes avec l’arrêté actuel, à l’exception des collectivités proposant une inscription à un menu végétarien quotidien par période de plus d’un jour (exemple : à l’année ou au trimestre).

Afin de prendre en compte les évolutions des recommandations alimentaires pour les enfants et les évolutions législatives récentes, notamment le menu végétarien hebdomadaire, un travail de révision de cet arrêté est en cours. La concertation sur les nouveaux critères a lieu dans le cadre du groupe de travail « nutrition » du conseil national de la restauration collective, qui est co-présidé par la direction générale de la santé et l’association nationale des directeurs de la restauration collective (AGORES), en associant le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire et le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ainsi que l’ensemble des parties prenantes concernées, notamment les associations environnementales.

De nombreux outils d’accompagnement à la mise en place de menus végétariens et à la promotion des protéines végétales ont été élaborés dans le cadre du conseil national de la restauration collective : un guide sur la mise en œuvre du menu végétarien hebdomadaire, un livret de recettes végétariennes adaptées à la restauration scolaire, un cadre général sur la mise en œuvre du plan pluriannuel de diversification des sources de protéines ou un guide pédagogique pour la formation initiale des cuisiniers.

De plus la campagne de communication « une idée légumineuse » a permis la promotion des légumineuses, notamment en restauration collective, à travers de nouvelles recettes ou un concours de cuisine.

Enfin, les avis d’expertise scientifique sont la base de la révision de cet arrêté : Ainsi, dans son avis de 2019 sur la révision des repères du programme national nutrition santé chez les enfants, l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) rappelle que durant l’enfance, la croissance staturopondérale importante et les pertes menstruelles chez les filles à l’adolescence entraînent des besoins en fer élevés. L’Anses indique que la consommation de viande et de poisson peut faciliter l’atteinte de la référence nutritionnelle en fer chez les enfants et qu’il semble judicieux que les portions de ce groupe d’aliments proposées aux enfants ne soient pas réduites au prorata de l’apport énergétique mais soient plus proches de la portion d’un adulte. Puis, le haut conseil de la santé publique (HCSP), dans son avis de 2020, indique qu’il est recommandé de consommer de la viande, du poisson, de la volaille ou des œufs chaque jour, toutefois en faisant remarquer qu’il n’est pas nécessaire de consommer de la viande à chaque repas pour les enfants. Enfin, dans son avis de novembre 2021, l’Anses indique notamment que l’augmentation du nombre de menus sans viande ni poisson ne modifie pas le niveau de satisfaction des apports en nutriments, au regard de l’atteinte des références nutritionnelles.

Par ailleurs, l’Anses a été saisie également en août 2022 pour caractériser et évaluer l’impact sur la santé de la consommation d’aliments transformés. Les résultats de cette évaluation conditionneront les mesures mises en œuvre en lien avec les aliments transformés, sujet d’attention grandissant.

Dans tous les cas, une fois les travaux terminés sur la révision de cet arrêté, l’Anses sera de nouveau saisie sur ce projet. En ce qui concerne les critères de durabilité, la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi « EGALIM », a introduit, dans son article 24, l’obligation d’atteindre au 1er janvier 2022 une part au moins égale, en valeur, à 50 % de produits durables et de qualité dans les repas servis dans les restaurants collectifs, les produits issus de l’agriculture biologique devant représenter une part au moins égale, en valeur, à 20 %.

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « Climat et résilience », a renforcé ces dispositions en ajoutant, à compter du 1er janvier 2024, l’objectif de 60 % de viandes et produits de la pêche de qualité et durables et en étendant ces objectifs à tous les restaurants collectifs dont des personnes morales de droit privé ont la charge.