J’interroge Vidal sur la précarité des étudiants suite à la crise du Covid

La crise du Covid a mis en difficulté les étudiants, du fait de l’interruption de leurs études, mais aussi des conséquences sociales de l’épidémie, et particulièrement pour celles et ceux qui étaient déjà précaires. Les réponses apportées par le gouvernement sont clairement insuffisantes.

Question écrite posée le 15/09/2020 :

M. Bastien Lachaud interroge Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, sur l’inquiétante précarité financière des étudiants, plus que jamais accentuée par l’épidémie de covid-19.

En effet, la crise sanitaire a des répercussions non seulement sociales mais aussi économiques, qui ont particulièrement touché les étudiants précaires. Ceux-ci ont été insuffisamment considérés par le Gouvernement. La seule et unique mesure qu’il a prise en faveur des jeunes est le versement d’une aide de 200 euros. Cependant, tous les étudiants n’ont pas eu accès à cette aide puisque celle-ci est conditionnée. Elle est réservée aux jeunes ayant perdu leur emploi étudiant pendant la crise sanitaire ou n’ayant pas pu effectuer leur stage obligatoire gratifié.

Néanmoins, il en demeure que ces mesures ne sont ni suffisantes, ni égalitaires ni même équitables. En effet, cette unique mesure est insuffisante et lacunaire pour faire face aux conséquences sociales de l’épidémie. Une aide ponctuelle de 200 euros demeure inadaptée pour des étudiants, qui vivaient déjà pour une grande partie sous le seuil de pauvreté, qui ont un loyer, des charges et des courses à payer.

Nonobstant, plusieurs mesures ont été mises en place par certains Crous, au niveau local, et des aides exceptionnelles accordées. Aussi, certaines écoles, universités et régions se sont mobilisées pour leurs étudiants et ont décidé de mettre en place des aides financières supplémentaires. Par exemple, l’université Sorbonne Nouvelle a décidé pour les étudiants les plus précaires d’une aide complémentaire à celle proposée par le Crous. Cette aide s’élève jusqu’à 300 euros et a été versée entre juin et juillet 2020 à 600 étudiants rencontrant des difficultés particulières lors de la crise. De même, une aide sociale d’urgence de 150 euros a été déployée par l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Toutefois, chaque établissement et Crous décident, seuls, le type de soutien et d’aide financière qu’ils apporteront à leurs élèves. Le Crous de Bourgogne-Franche-Comté a pu ainsi décider de débloquer un fonds d’urgence de 270 000 euros contre la précarité étudiante.

Les montants et les conditions d’attribution varient donc en fonction des régions et des ressources des établissements. Cette différence de traitement constitue une grande inégalité face à la crise, en renforçant encore davantage les inégalités préexistantes. Cette situation a fait monter la colère sur les réseaux sociaux, colère qui a été véhiculée par le biais de plusieurs hashtags comme #HonteUnivP1, #HonteUnivFrance, #HonteUnivLorraine, etc. De surcroît, face aux mesures de confinement, alors que la hantise du loyer impayé montait chez les étudiants, les bénéficiaires d’un logement Crous ont été exonérés du paiement du loyer d’avril 2020.

L’exonération accordée pour un seul mois semble toutefois trop faible pour compenser les pertes de revenus liées à la crise. Une exonération des loyers doit être accordée pour les étudiants qui peinent à payer leurs loyers en résidence Crous pour les mois de juillet et août 2020. Selon les chiffres de l’observatoire de la vie étudiante, 46 % des étudiants travaillent à côté de leurs études en France.

Le non-renouvellement des emplois ou encore l’annulation des stages, emplois considérés comme non essentiels dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire par le Gouvernement, ont mis en difficulté des milliers de jeunes. Ils sont donc nombreux à avoir perdu l’unique source de revenus et ne peuvent pas pour autant prétendre au chômage partiel. Le contexte économique actuel n’incite pas forcément les entreprises à embaucher, la plupart des jeunes n’ont pas trouvé des emplois saisonniers. La jeunesse pâtit beaucoup du contexte économique actuel car il y a non-renouvellement massif des contrats d’intérim et des contrats en CDD. Ces contrats qui s’adressent essentiellement aux jeunes les laissent encore plus démunis face à la crise.

Privés de ces emplois vitaux pour assumer leurs loyers, ces jeunes doivent alors assumer toutes ces dépenses sans aucune aide financière de l’État. Non seulement les étudiants les plus précaires n’ont reçu aucune suspension de leurs loyers durant l’été 2020 mais vont aussi peiner à trouver un emploi étudiant dans les mois qui suivent. Il en résulte que l’État doit employer les moyens financiers les plus adéquats pour assurer des conditions de vie dignes à ses étudiants.

Pour soutenir l’emploi des jeunes, le Gouvernement a élaboré un plan de relance présenté le 3 septembre 2020 consacrant notamment le plan « #1jeune#1solution ». En effet, 6,5 milliard d’euros sont prévus sur 2 ans, destiné à soutenir l’arrivée de 800 000 jeunes sur le marché du travail. En réalité, il ne s’agit nullement d’une mesure destinée à soutenir les jeunes directement. Il s’agit plutôt d’un soutien aux entreprises, que d’une garantie d’emploi des jeunes. En effet, l’État subventionnerait à hauteur de de 4 000 euros l’emploi d’un jeune, sans aucune garantie de continuité de son emploi à la fin de la subvention.

La France Insoumise propose de mettre en place des emplois jeunes, présentant une garantie d’emploi de 5 ans, permettant aux personnes de se projeter dans l’avenir.

M. le député souhaite savoir pourquoi ce dispositif n’est pas à l’étude, alors qu’il garantit l’emploi des jeunes, tandis que les subventions ne font que le favoriser sans certitude.

Plus globalement, il souhaiterait savoir pourquoi ces exonérations ne sont pas conditionnées à des garanties en termes de stabilité du contrat.

Dans ce contexte, M. le député souhaiterait savoir quels moyens l’État met concrètement en place pour assurer l’égalité des étudiants face aux répercussions socio-économiques engendrées par la crise sanitaire de covid-19 à l’échelle nationale.

Pour cela, il souhaiterait également avoir un bilan des différentes actions qui ont été mises en place ou sont prévues par le Gouvernement pour soutenir financièrement l’ensemble des étudiants précaires.

Plus largement, il lui demande de mettre en place la suspension des loyers des logements Crous pour les mois à venir et veut savoir ce qu’elle compte faire pour éviter de précariser encore plus la jeunesse.

Lire la réponse, publiée le 22/12/2020 :

L’année universitaire 2019-2020 a été marquée par une crise sanitaire sans précédent qui a conduit le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) et l’ensemble de ses opérateurs à apporter dans l’urgence des réponses aux difficultés rencontrées par ses membres et pour assurer aux mieux la continuité de l’activité. Dès le début de la crise sanitaire, des mesures ont rapidement été prises par le MESRI pour soutenir les étudiants face aux difficultés rencontrées, et en particulier pour lutter contre la précarité :

– le financement par les établissements d’enseignement supérieur et les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), grâce à une mobilisation de la contribution de vie étudiant et de campus (CVEC), de nombreuses actions pour lutter contre la précarité alimentaire, numérique et sanitaire des étudiants, comme la livraison de panier-repas, la distribution de e-cartes alimentaires, l’octroi d’aides financières d’urgence, le prêt de matériels informatiques, l’extension de forfaits téléphoniques et Internet pour lutter contre l’isolement numérique et l’accès à de la téléconsultation et à du soutien psychologique : entre le mois de mars et le mois de juin, 19M€ y ont été consacrés ;

– l’abondement de 10 M€ supplémentaires au titre des aides spécifiques pour les aides d’urgence versées par les CROUS ;

– l’exonération du préavis des loyers CROUS pour le mois d’avril pour les étudiants ayant quitté leurs logements en résidences universitaires en mars, au moment de la mise en place du confinement.

Face à une situation inédite, le Président de la République a souhaité apporter une réponse supplémentaire et a annoncé le 13 avril 2020 qu’une aide exceptionnelle serait versée aux jeunes en situation de précarité. Cette nouvelle aide exceptionnelle, présentée par le Premier ministre le 4 mai dernier s’adressait à 800 000 jeunes en situation de précarité, dont les étudiants, boursiers comme non boursiers, représentent près de la moitié. D’un montant forfaitaire de 200 €, cette aide était destinée :

– aux étudiants ayant perdu leur emploi ou leur stage gratifié du fait de la fermeture au public de l’établissement où ils exerçaient ou de la baisse de son activité à la suite à de la mise en œuvre des mesures de lutte contre la propagation de l’épidémie du Covid-19 ;

– aux étudiants ultramarins en mobilité en métropole au moment de la mise en œuvre des mesures d’interdiction de certains déplacements prises pour faire face à l’épidémie.

Par ailleurs, afin de tenir compte de la prolongation du calendrier pédagogique dans certaines formations dans le contexte exceptionnel lié à la crise sanitaire de la Covid-19, il a été décidé que les étudiants dont les concours ou examens terminaux ont été reprogrammés au-delà du 30 juin 2020 pouvaient exceptionnellement recevoir un mois supplémentaire de leurs bourses sur critères sociaux. Aucune démarche n’était requise de la part des étudiants. Une enveloppe de 30 M€ a été ouverte à cet effet dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2020 n° 2020-935 du 30 juillet 2020.

Pour la rentrée universitaire 2020-2021, suite à la crise sanitaire, la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, a annoncé le gel du montant des frais d’inscription à l’université. Les frais d’inscription, qui n’augmenteront donc pas pour la deuxième année consécutive, s’élèvent à 170 € pour la Licence, 243 € pour le Master et 380 € pour le Doctorat. À cette même rentrée les montants des bourses sur critères sociaux ont été réévalués de 1,2 % afin de tenir compte de l’inflation. Chaque étudiant verra donc sa bourse augmenter, selon son échelon, d’un montant annuel pouvant aller jusqu’à 67 € pour l’échelon 7.

Le Premier ministre a également annoncé, lors de son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale le 15 juillet 2020, la mise en place du ticket de restauration universitaire à 1€ pour les étudiants boursiers, afin de répondre aux difficultés renforcées par la crise sanitaire pour s’alimenter. Ce tarif social, maintenu pendant le second confinement grâce à la vente à emporter, permet l’accès à une alimentation équilibrée et durable, à un prix très modique, dans plusieurs centaines de structures gérées par les CROUS, qui maillent le territoire national.

Enfin, une prime exceptionnelle de 150€ a été versée au mois de décembre pour les étudiants boursiers et les 400 000 jeunes percevant les APL. A ces aides et dispositifs s’ajoute l’accompagnement sanitaire et psychologique soutenu par la mobilisation des personnels médicaux des services de santé universitaires et les services sociaux des CROUS. Enfin, le ministère soutient l’emploi étudiant en promouvant le dispositif d’étudiants employés par les établissements d’enseignement supérieur et par les CROUS dédiés à l’accueil et à l’animation de la vie des établissements.

Ce dispositif permet à la fois de promouvoir la vie étudiante par les pairs, de développer les compétences professionnelles des étudiants tout en soutenant financièrement les étudiants. Les étudiants sont recrutés sur des critères académiques et sociaux. Le dispositif se fonde sur un nombre limité d’heures afin que l’emploi n’entre pas en concurrence avec la réussite dans les études. Ces emplois peuvent être financés par la contribution vie étudiante et de campus. Suite aux annonces du Premier ministre, le réseau des œuvres s’est engagé dans le recrutement de 1 600 jeunes supplémentaires pour assurer, via ce dispositif, la présence d’étudiants référents dans les résidences universitaires.

L’accompagnement humain se poursuit également grâce au recrutement de 20 000 étudiants tuteurs dans nos universités. Jusqu’à 200 000 étudiants supplémentaires pourront ainsi être accompagnés jusqu’à la fin du second semestre, en ciblant tout particulièrement les premières années de licence et de DUT.