Les réseaux de fibre sont une pagaille totalement désorganisée par la sous-traitance… qui est elle-même sous-traitée ! En 2020, ce sont plus de 800 plaintes qui ont été déposées. Comment le gouvernement souhaite-t-il réguler ce marché dépendant du plan France très haut débit ?
Question écrite au gouvernement, déposée le 20 septembre 2022 :
M. Bastien Lachaud interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications, sur la situation de l’installation chaotique de la fibre optique.
Le plan France très haut débit vise à couvrir l’intégralité du territoire français en très haut débit en 2022. Ce chantier national a connu une accélération qui s’est souvent faite au détriment de la qualité des installations. En effet, les collectivités locales et les abonnés ont pu déplorer l’inopérance d’une partie du réseau : plus de 800 plaintes ont été déposées auprès du syndicat mixte du très haut débit depuis mai 2020.
Il y a donc une inégalité d’accès des citoyens au très haut débit et de fortes disparités territoriales. Le mode de mise en place des raccordements à la fibre optique est remis en cause. Les raccordements sont faits de manière précipitée et à la hâte, pour tenir les délais. Les opérateurs commerciaux ont été autorisés à se charger eux-mêmes du raccordement final. Cette sous-traitance aux opérateurs commerciaux (STOC) est elle-même souvent sous-traitée. Les techniciens qui opèrent effectivement sur les réseaux sont peu formés, sous-équipés, trop souvent sous-payés et embauchés en contrats précaires. Ces sous-traitances en cascade, qui relèvent d’un marché dérégulé, ont de graves conséquences tant sur la qualité des installations, que sur les conditions de travail des techniciens et opérateurs.
L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) a alerté le 12 mars 2021 sur l’inaction des exploiteurs réseau et des opérateurs commerciaux, qui n’ont toujours pas établi de cadre contractuel menant à de bonnes pratiques, ce afin de limiter le nombre de sous-traitants en cascade, dans le but d’améliorer la qualité du réseau ainsi que les conditions de travail et de rémunération des installateurs-câbleurs. Selon le rapport de cette institutions, 20 à 30 % des installations ne sont pas fonctionnelles, du fait de défauts de qualité qualifiés d’ « inacceptables ». À ce point que l’ARCEP a lancé un nouveau plan d’action contre les mauvais déploiements de la fibre optique fin 2021.
Dans sa réponse à la question de la députée Annie Genevard publiée au JO le 31 août 2021, sur le même sujet, le Gouvernement a admis que le système de sous-traitance des raccordements conduisait à « une croissance des signalements de dégradations ». Le Gouvernement signale un « meilleur contrôle des opérateurs d’infrastructure » et « une meilleure maîtrise des cascades de sous-traitants », ainsi que la mise en place d’« indicateurs visant à objectiver les problèmes identifiés et à surveiller leur évolution ». Le Gouvernement envisage de mobiliser « d’autres leviers plus contraignants ». Toutefois, la réponse du Gouvernement n’aborde pas le sujet de la précarité ou des conditions de travail des techniciens du milieu et ne donne pas d’indication pour garantir l’accès des techniciens à des formations. Or la garantie de la formation et des conditions de travail des techniciens, la pérennité de leurs emplois, est une condition de leur expertise technique, donc de la qualité des installations produites.
Aussi, M. le député souhaite savoir ce que compte faire le Gouvernement afin de garantir des formations et des conditions de travail décentes pour les installateurs-câbleurs ; il souhaite avoir le détail des mesures contraignantes que compte prendre le Gouvernement pour interdire la sous-traitance en cascade et réguler ce marché qui dépend exclusivement du plan France très haut débit. Il souhaite savoir quand il compte revenir sur cette sous-traitance et rétablir un cadre national d’installation des infrastructures de télécommunication et titulariser l’ensemble des salariés précaires.